Partir ou fuir ?

8 août 2021

Nadine P.

Au bout de nuit, un seuil éclairé
Nous attire encore vers son doux mystère.
Les grillons chantant l’éternel été,
Quelque part, la vie vécue reste entière.

Envie de partir, envie de fuir quelque temps, je crois. Le pass à contrôler dès lundi dans l’établissement où je travaille. Lieu de rencontres, d’échanges, de conseils et de culture, pincement au cœur quand on croit à notre « mission » de service public depuis si longtemps. Partir en congé avant lundi ou fuir ?

À l’apogée de l’été,
Revient ce qui a été :
Tous les fruits hauts suspendus,
Toute la soif étanchée.

Respirer dans la Drôme – camper dans la Drôme – rencontrer le héron en bord de rivière, les « souriants » du pays, les chemins bosselés ou en creux, les plats locaux ou les boîtes exceptionnellement réchauffées dans ma casserole, quand manger remplace un soir cuisiner devant ma tente.

Tu surprends le vol des lucioles,
Tu entends la chute des pétales,
Est-ce l’heure des solitudes
Pour toi ? Ou celle du partage ?

Partager ou contempler seule le coucher de soleil sur le Vercors – happer les senteurs matinales quand tout dort, encore – respirer le calme, la quiétude, la lenteur – écrire sur l’herbe ou accoudée à la table dépliée, trésor de mes parents que les ans ont miraculeusement épargnée – grimper à l’assaut de ces courbes qui me narguent à l’horizon depuis la vallée.

Nuit de lune. Quelqu’un, seul, se lève,
S’émeut de ce que depuis toujours
Tant d’autres ont vu et tu ; il s’ouvre
À l’ardent courant du pur espace.

Nuits des étoiles, nuits étoilées, pas de lumière artificielle pour gâcher la scène – les horaires minutés sont dans l’oubli, restés dans la cadence de semaines travaillées, là oubliées, repensées bien plus tard quand, en remontant vers la Bourgogne, je sentirai qu’écrire avec d’autres autour d’une même table, même avec le pass obligé, deviendra une priorité de rentrée.

En italique extraits de Enfin le royaume de François Cheng, © Gallimard

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