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Grains de sel
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Blog créé par l'Association pour l'autobiographie (APA) pour accueillir les contributions au jour le jour de vos vécus, de vos expériences et de vos découvertes culturelles.
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17 juillet 2024

D’une maison à l’autre, 2ème partie

Carole Roche

 

1976-7981

Un appartement dans un village à Montcenis, en Saône-et-Loire, voici l’histoire de notre premier achat. Nous avions repéré cette maison un peu triste sur une place lors de nos promenades aux alentours du Creusot. Ensemble, nous nous étions fait la remarque qu’elle nous plairait bien si elle était à vendre. Je ne sais pas si vous avez ces mêmes pensées : en voyage, en promenade, vous flashez sur une façade, un jardin, une simple fenêtre et vous ajoutez la maison à la liste de « vos » maisons, celles où vous pourriez vivre, de la ferme normande à la demeure bourgeoise, du pavillon de garde-chasse à l’isba lointaine.

Hasard ou chance, sa photo parut dans une agence immobilière locale, en 1976. Sa propriétaire l’avait reçue en héritage de sa patiente et préférait la vendre à des inconnus plutôt qu’à la famille de sa donatrice. Vous imaginez l’accueil que nous avons reçu quand nous nous sommes présentés pour effectuer quelques travaux avant de nous y installer. La famille lésée vivait au rez-de-chaussée, nous nous installions au premier, nous devions partager le couloir central et user d’un droit de passage à travers leur jardin pour rejoindre le nôtre. Froideur, lèvres serrées. Le temps apaisa les tensions, surtout quand la vieille Pauline me dit : « oh ! J’aime bien entendre les petits pas de votre fils, c’est de la vie dans la maison. Tenez, prenez ces deux salades, mais ne dites rien à Fernand et à ma fille, hein ! » La rancœur a duré longtemps chez le vieux Fernand, au point que je l’ai surpris, quelques années plus tard, en train de piocher autour de la borne de séparation des jardins, pour la déplacer manifestement à son avantage. Les faits sont prescrits maintenant.

Des fenêtres de l’appartement, nous observions la vie quotidienne du centre du village, les allers et venues des clients de la boucherie, du marchand de journaux et de l’épicerie, du marchand de chaussures et de l’électricien. Tous ces commerces réunis au cœur de la commune. Les jours de commémoration résonnait la fanfare, avec ses couacs prévisibles et la minute de silence où j’éloignais du balcon mon fils, bien prompt à babiller au mauvais moment. Façade recrépie, porte d’entrée changée, balcon en fer forgé magnifique, nous avons redonné quelques années plus tard un peu d’allure à la maison quand nous avons pu acheter l’appartement des voisins après le décès de la chère Pauline. Entre-temps…

 

1981-1984

Le temps de l’expatriation. Depuis longtemps, François voulait voir le monde. Expatriés à l’autre bout, pourquoi pas ? Nous avons fermé la maison qui avait vu naître en 1977 notre fille, nous avons laissé souvenirs, meubles et amis pour l’inconnu et aller travailler pour la culture et la langue françaises au Japon. L’immeuble des années 30 offrait deux appartements pour les responsables de l’Institut français de Tokyo. Le plus grand, transformé en salles de cours de français pour répondre à l’explosion de la demande de culture française chez les élites tokyoïtes, le plus petit pour le nouveau directeur, mon mari. Modeste surface, immense à l’aune des appartements japonais, ce trois pièces nous convenait quand même. La terrasse donnait sur le jardin de l’Institut, entretenu à l’automne par une troupe de vieilles dames qui épluchaient les pins, nettoyaient les camélias et balayaient les branches du saule presque entièrement taillé.

À l’entrée de l’appartement, un autocollant représentant un chien nous informait que le directeur précédent avait été assujetti à la taxe sur les animaux domestiques. Au bout d’un an, nous avons adopté une jolie chatte « écaille de tortue » qui a profité plus tard du toit terrasse pour aller batifoler et nous ramener huit chatons au printemps suivant. Nos enfants étaient ravis, nous beaucoup moins. Comment placer huit bébés chats quand on parle à peine la langue ? Heureusement, une des secrétaires s’est chargée du don et nous avons juste gardé la mère et un seul mâle, qui nous sont suivis dans nos maisons suivantes.

 

1984-1988

De retour en France, un nouvel appartement, cette fois à Paris dans le 12e arrondissement, tout près de la Porte Dorée et son musée « des colonies » à l’époque. Une seule chambre pour les enfants grandissants, source de conflit. Nous avons dû transformer un petit espace devant un placard en microchambre pour notre fille, son lit tout contre une fenêtre à barreaux, qui garantissait sa sécurité. Le train de petite ceinture avait dû passer en contrebas, on apercevait encore les rails et les faux acacias prolifiques le long de la voie. Rien ne poussait dans les jardinières en béton du balcon en retrait. Attention au nettoyage, la voisine se plaignait de nous auprès du concierge. Je me sentais à l’étroit dans cet espace certes moderne, mais froid. Les deux chats aussi. Ils griffaient les tapisseries pour mieux marquer leur réprobation. Même le jardin, au pied des immeubles, était tracé au cordeau de béton et n’inspirait pas la promenade.

Quatre années d’une vie trépidante, agitée pour moi, qu’une nouvelle nomination allait bousculer encore un peu plus.

 

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