Bye-bye, Bretagne…

Bernard M.

C’est un peu dur de s’arracher. On se sent vraiment bien ici. L’idée que l’on avait vaguement évoquée pendant un temps, avant de nous installer dans notre grande maison du sud-ouest, d’acheter une vraie maison par ici et de nous y poser pour notre retraite plane encore parfois en nous, non pas comme un regret, mais comme une sorte d’évanescent fantasme…

La rentrée scolaire est passée par là. Beaucoup de maisons sont fermées. Même lors de belles périodes ensoleillées, la rue de la Plage qui passe devant chez nous reste bien calme : moins de voitures, moins de vélos, moins de piétons. Et plus grand monde non plus sur la vaste plage même aux heures les plus clémentes du milieu d’après-midi. La cabine des maitres-nageurs sauveteurs est fermée, plus de drapeaux indiquant les conditions de baignades, le tableau où était inscrit chaque jour température de l’air et de la mer, horaire et coefficient des marées, sens et force du vent a été nettoyé à fond et reste vide. Dans notre immeuble même tous les estivants sont partis, ne restent plus, en dehors de nous, que les deux occupants d’appartements à l’année. Plus de queue au marché non plus, le stand de la ferme où nous achetons tranches d’agneau, fromages et yaourts de brebis, prend le temps de la conversation.

Pendant notre séjour nous avons également fait un petit voyage. Nous sommes allés voir une amie à Lannion et en avons profité pour aller jusqu’à Trébeurden, la côte y est profondément différente d’ici, caractérisée par la présence de rochers en granit rose, c’est le début de cette fameuse côte de granit rose qui va jusqu’à Perros-Guirrec en passant par Ploumanach. D. y a beaucoup de souvenirs de vacances, ses grands-parents ayant eu longtemps une maison à proximité. Nous avons aussi fait halte pendant deux jours dans un petit hôtel à Landerneau et sommes allés voir l’exposition Cartier-Bresson à l’espace culturel Leclerc, les « épiciers de Landerneau » ont fait bénéficier leur ville d’origine de quelques-unes de leurs largesses. Tous les ans s’y tiennent des expositions en général de très belle qualité, je me souviens notamment de celles consacrées à Chagall et Enki Bilal. Beaucoup de ces photos de Cartier-Bresson sont très connues, mais il y en avait aussi d’autres qui le sont moins et il était très appréciable de les voir replacées dans leur contexte. Était également projeté un film très poignant réalisé par lui sur le retour des prisonniers de guerre et des déportés en 1945. Plus léger, mais délicieux, un court film suivant Cartier-Bresson au travail, allant, venant, se dressant sur la pointe des pieds, sautillant, à la recherche de l’angle pour mieux capter son sujet et accrocher « l’instant décisif ». Nous nous sommes également arrêtés à l’abbaye de Daoulas, autre lieu de belles expositions. Celle de cette année était consacrée aux relations et échanges culturels entre la France et le Japon. Des Samouraïs aux Kawaii, fort intéressante elle aussi. Et Daoulas c’est aussi le plaisir de la déambulation dans le beau parc qui entoure le bâtiment, avec ses espaces très diversifiés, avec son potager et son jardin de simples…

Nous sommes rentrés hier après une halte à Nantes, où nous avons pu profiter, avec l’ami chez qui nous faisions étape, d’une belle promenade au bord de l’Erdre. D’habitude il y a toujours au moment des vacances, joie de partir et joie de revenir. C’est curieux, mais cette année la joie de revenir n’est pas vraiment là. Est-ce la perspective des divers rendez-vous médicaux pris de longue date chez des spécialistes qui vont se succéder dans le courant du mois tant pour D. que pour moi-même ? Les travaux importants que nous allons faire effectuer sur la maison et les diverses démarches que nous avons à effectuer en préalable ? Est-ce une lassitude générale de vieux ? Un peu de tout ça sans doute…

Pour notre dernière journée bretonne vendredi, nous avons bénéficié d’un temps particulièrement beau. Dernière promenade par le sentier du port à la plage, dernier bain, l’air est un cran plus frais que les jours précédents, mais la température de l’eau reste tout à fait acceptable à 17/18 degrés. Le soir, dîner sur la terrasse face au soleil couchant. Nous n’avons pas droit ici au coucher de soleil sur la mer, notre plage étant orientée sud. Pour un coucher sur la mer, il faut se rendre sur la baie d’Audierne où le soleil plonge sur l’océan qui s’étend sans interruption jusqu’aux lointaines côtes américaines. C’est en général somptueux… Le soleil chez nous disparaît de façon moins romantique derrière des arbres et des maisons, mais c’est bien beau tout de même…