Qu'est-ce qu'une maison ?

Nadpic

D’emblée j’ai songé aux dessins d’enfant, murs droits, toit rouge, fenêtres réparties sur la façade, deux au rez-de-chaussée et deux à l’étage, rideaux tenus par des embrases dans une belle harmonie symétrique, ambiance bien proprette. Le dessin donne à la porte d’entrée une place importante, par sa couleur, sa grandeur parfois disproportionnée. Le petit chemin qui y mène est dans le même esprit : on ne peut pas se tromper, c’est là qu’il faut habiter !

Je n’habite pas dans cette maison, mais j’y ai vécu même si le dessin n’est pas totalement fidèle. Dans des moments de vie, fragments d’amour, ce sont des lieux que j’ai apprivoisés pour les faire miens sans savoir qu’ils étaient éphémères.

Mais hier, ma « maison-appartement » est devenue en un instant une vraie « maison-transmission » et ça m’a bouleversée.

L’histoire a débuté ainsi.

La recyclerie où je vais régulièrement bradait fortement des meubles tout un week-end, chercher sans chercher vraiment, c’est le but de mes visites. Trouver est facile !

Un très grand bureau recouvert de cuir ouvragé avec de multiples tiroirs de chaque côté de l’assise m’attend. Le voyant, je m’imagine déjà en train d’écrire, cartes à envoyer, car je résiste encore, préparation d’ateliers, journal.

L’autre meuble, qui a ma préférence, est une vitrine. Collectionnant les verres dépareillés, les personnes venant manger chez moi doivent choisir leurs verres, mais depuis longtemps elles ne peuvent plus voir facilement ceux placés en retrait.

La vitrine que je découvre est parfaite en dehors d’un côté un peu vieillot, mais je m’en fiche, elle n’a pas de défauts, c’est bon. Étagères étroites et longues, je pourrai étaler mes verres au mieux. Là encore, je me vois déjà faire.

Somme dérisoire pour les deux achats, je me lance.

Mais ajouter des meubles dans une maison n’est pas facile, dans un appartement c’est un casse-tête.

Lequel enlever et si je me débarrasse de celui-ci où mettre ce qu’il contient ?

Je propose à mon fils qui n’en a aucune, une table étroite donc pratique, mais un peu plus basse que la norme, bricolage d’un vieil oncle. Sans plus de conviction, je l’informe aussi que je vais me séparer du secrétaire de Papou, son grand-père, meuble dont il ne voulait pas du tout « avant ».

« Oui, oui, je suis chaud pour tout prendre », me dit-il sans hésiter. Je suis émue, très émue.

Murs, toit, fenêtres, c’est ça La maison, mais pour moi c’est surtout ce qu’on y met, amour, émotions, ce qu’on espère partager de différentes façons, un jour.