La colère et la lune pleine
Nadpic
La colère ? Oui, forcément. Mayotte a affronté une nouvelle tempête, quelle surprise à cette époque de l’année ! J’enrage.
J’ai évité d’écrire mon ressenti dans l’heure quand j’ai entendu cette information hallucinante : l’interdiction de vendre des planches et tôles à des personnes ne pouvant fournir une adresse sur l’île. Quelle connerie ! Mais quelle adresse ? Il y a de nombreux quartiers sans adresse précise. Quand j’y demeurais, je n’avais jamais réussi à retrouver quelqu’un auquel je tenais dans le dédale des ruelles étroites. Ce texte voté me fait penser aux circulaires contre les juifs durant la Seconde guerre mondiale, aux déclarations à fournir, enregistrement sous un prétexte au départ sans conséquences annoncées, puis ce qui a suivi. Dans ces maisons de bric et de broc, on va pouvoir trouver des voyous et des personnes à remettre à l’eau qu’on pourra chasser de cette façon.
Une fois encore, des décalés de la réalité, décisionnaires en métropole ou des nantis sur place, trouvent là un moyen honteux de faire le ménage. Ils n’ont pas osé mettre « à bas les étrangers » sur la loi prise en urgence, ils auraient pu.
Ceux qui se retrouvent sans abri à la saison des pluies, quelle que soit leur origine, devraient porter plainte pour non-assistance de personnes en danger. Il n’y a d’ailleurs pas que de « mauvais clandestins » qui habitent et se cachent là sous ses tôles et planches ajourées. Au-delà de ces actions et décisions inqualifiables, la réalité n’est pas celle-ci. De nombreuses personnes vivent, travaillent sur l’île en toute légalité, mais demeurent dans ces bâtisses faites de rien. Les matériaux tout importés ont un coût prohibitif pour la plupart des habitants. Ce qui n’excuse pas du tout ce qui précède, bien sûr, mais qui pourrait permettre de le dénoncer plus fortement porterait haut des voix susceptibles d’être plus entendues. Au fil des années, hélas, ces voix se taisent pour avoir, elles, un privilège.
Comment a-t-on pu laisser en toute « bonne » conscience ces décisions être actées ? La colère ne peut être vivante en permanence alors, quand mon petit matin m’offre la lune pleine, qu’elle envahit clairement toute ma fenêtre, je reste dans le noir de la pièce avec ce spot enflammé devant les yeux. La même lune accueille Charlie Dalin une heure plus tard, en décorant joliment son arrivée, après deux mois de mer.
J’ai enfin un fil pour la joie et la possibilité de souhaiter à toutes et tous, des moments de rien, de tout et du plaisir de vivre.
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