Chroniq’hebdo | De la vieillesse, de Françoise Ascal et de la campagne
Pierre Kobel
/image%2F1169248%2F20250806%2Fob_eff982_logo-chroniqhebdo.jpg)
Un matin j’écoute Antoine de Caunes sur France Inter, venu parler du vieillir au micro de Charles Pépin et au même moment Elizabeth m’envoie un billet sur le même sujet pour Grains de sel. Repousser la vieillesse chaque jour, laisser le vieil homme à la porte, comme dit Clint Eastwood et rester ouvert et curieux. Les raideurs du corps ne doivent pas être celles de l’esprit. Ailleurs dans le dernier livre de Françoise Ascal, Un abri dans l’ouvert à la date du 6 février 2021, elle écrit : « Vieillir est une expérience inédite. Ne ressemble à rien de ce que l’on a vécu. On se dédouble, le corps va de son côté, l’esprit de l’autre. Le corps cède, l’esprit résiste… intérieurement on n’a pas l’âge de son corps. On est dissocié. » Comme je partage de tels propos ! Et ailleurs : « La vieillesse, un naufrage ? Peut-être que oui, même si j’ai toujours refusé cette idée. » Moi aussi, je voudrais la refuser, mais combien de fois je me suis inquiété ces derniers mois !
/image%2F1169248%2F20250806%2Fob_05dacb_20250806gds-mots-pkobel-chroniq-hebdo1.jpg)
Françoise Ascal, dans ses carnets de 2018 à 2022, a des pages terribles sur la souffrance liée à la maladie, sur les nuits de terreur sans sommeil, sur la médecine qui nous chosifie et met la maladie au centre en excluant l’humain qui va avec. Ce livre me laisse en arrêt. Je voudrais n’y voir qu’un long cheminement à la recherche d’une forme de sagesse, mais il est trop traversé de douleurs, de maladie, de deuils pour ne pas m’attrister aussi.
Et puis je retrouve aussi la Françoise compagne de Montaigne, de Bachelard et bien d’autres qui me sont familiers, comme à elle, immergée dans son jardin de grande banlieue, se ressourçant dans la propriété familiale de province, toujours femme de la terre, les pieds et la mémoire ancrés au sol et écrivant des pages qui nous élèvent à des cimes inaccessibles sans elle.
Ses mots sont des intercesseurs avec la vie, avec la mort et elle est depuis longtemps de mes auteurs de chevet.
*
Après les deux semaines au bord de la Méditerranée, changement de paysage. Quelques jours à la campagne. Douceur du jardin et le grand tilleul nous protégeant d’une ombre bienveillante. J’essaie de profiter sans réserve de ces heures, sans penser à demain, à ce lieu qui va disparaître de ma vie. Les heures passent sous un soleil nuageux, je vais d’un recoin à un autre, je trie des objets, autant de souvenirs, et tous ceux que je ne peux conserver m’éloignent douloureusement du demi-siècle familial de cette maison. Strates de l’existence de mes parents, dont la dernière demeure à l’autre bout du village m’aspire au vide.
Heureusement, il y a la nature. Celle qui m’entoure, les chemins que j’ai parcourus cet après-midi avec ma compagne, celle du Regain de Giono que je vais relire ce soir. Celle que célèbre Françoise Ascal dans toute son œuvre.
/image%2F1169248%2F20250806%2Fob_57f5cf_20250806gds-mots-pkobel-chroniq-hebdo1.jpg)
Internet
-
Wikipédia | Françoise Ascal
-
Al Manar | Un abri dans l’ouvert