La colline brûle !
Jacqueline Desmaretz
Depuis 10 h du matin, c’est la ronde incessante de 4 canadairs vrombissant au-dessus de notre maison. De gros nuages rougeâtres surplombent la colline distante seulement de quelques centaines de mètres, des fumées noires s’étirent le long de la crête. Le feu semble jouer à cache-cache, quand on le pense circonscrit, il réapparaît à quelques mètres, plus fort, plus près. Nous assistons impuissants au défilé des camions-citernes partant à l’assaut des flammes. Le vent très violent souffle vers l’autre versant de la colline. À intervalles réguliers, les dizaines de camions se ravitaillent en eau à la bouche incendie jouxtant la maison. Les hommes ont chaud, les visages ruissellent de sueur. Spontanément avec les voisins, la solidarité s’organise, nous mobilisons toutes les bouteilles d’eau disponibles, sortons des biscuits, en-cas confectionnés à la hâte. Ces hommes impressionnants de calme nous rassurent, de ce côté nous serons épargnés. Les flammes n’ont pas touché la tour Chappe, ni la chapelle Saint-Antoine chères au cœur des saints bauzillois… Par contre des flammes d’une hauteur de 10 mètres ravagent la garrigue sur le plateau, courent vers Aumelas, le village voisin, s’approchent dangereusement des habitations. Les 4 canadairs rejoints par 2 autres continuent inlassablement leur va-et-vient entre le lac du Salagou et la colline. Ces avions rouges et jaunes volent si bas qu’on pourrait identifier leurs matricules. Nous suivons les infos en continu à la télé, elles sont alarmantes. 1000 hectares sont déjà ravagés, mobilisant 650 pompiers ! À 18 h, le feu n’est toujours pas circonscrit, des habitations sont évacuées et leurs occupants répartis dans les villages voisins. À la tombée de la nuit les vols cessent, le feu semble fixé, mais, invincible il reprend plus loin obligeant les pompiers à continuer le combat durant toute la nuit. Au réveil une odeur de cendres mouillées me ramène à la réalité, notre belle forêt est détruite !
Aujourd’hui, le village vit en état de siège, des dizaines de véhicules de pompiers envahissent places et parkings publics. Le Poste de commandement pilote les opérations depuis la cave coopérative, les hélicoptères stationnent devant l’école, survolent à intervalles réguliers toute la zone à risques. Un dispositif impressionnant de véhicules de surveillance est posté sur chacun des accès conduisant au village. Les journalistes dépêchés sur le site filment les interviews du maire, des sapeurs-pompiers gradés et du sous-préfet… Saint Bauzille de la Sylve a les honneurs des télés nationales ! Des SMS inquiets de la famille et amis des quatre coins de France s’enchaînent sur le smartphone…
L’organisation méthodique du dispositif des pompiers me sidère. Avec efficacité chacune, chacun est à sa place. J’apprends que plus de la moitié des intervenants sont des sapeurs volontaires. Leur courage et leur détermination à sauver le maximum de végétations en plus de protéger les habitations sont remarquables. Ils en parlent comme d’une évidence avec humilité sans fanfaronnade.
En visionnant les photos prises en pleine action des canadairs larguant leur cargaison d’eau, je pense évidemment à d’autres avions chargés de munitions meurtrières à la porte de l’Europe. Autres réalités diffusées sur nos écrans depuis cinq mois qui relativisent la peur de ces deux derniers jours…
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