Les choses ? Quelles choses ?

Elizabeth LC.

« Les choses n’ont pas de signification.
Elles ont une existence. »
Fernando Pessoa

En ces jours de fête, pas mécontente de prendre des chemins de traverse, je suis allée au Louvre voir l’exposition Les choses — une histoire de la nature morte (elle dure jusqu’au 23 janvier 2023).

« L’expression française “nature morte”, née à la fin du 17^e siècle, définit mal ce qui est en réalité la représentation d’un amoncellement de choses, parfois bien vivantes, associées selon un ordre choisi par l’artiste. Le mot “chose” adopté par l’exposition semble donc plus adéquat pour traiter cette thématique dans son ensemble. », indique le musée dans son dossier de présentation.

Autant le dire tout de suite, je ne suis pas d’accord avec cette dénomination. Mon impression globale de l’exposition a été que, sur les 170 œuvres présentées, les natures mortes, justement, dominaient en nombre. Or elles représentent rarement des choses (au sens d’objets) seulement et beaucoup plus souvent des éléments issus du vivant : fleurs, fruits et légumes, animaux (dans la mesure où ceux-ci sont destinés à devenir des aliments…).

Larousse donne comme définition du mot chose : « Tout objet concret par opposition aux êtres animés », ce qui m’embarrasse encore pour ce qui concerne le végétal. Je vois bien que j’ai tendance à tirer le sens de « chose » du côté d’« objet ». Des artefacts, donc ? Quoique, il y aurait bien des nuances aussi, car je ne vois pas d’objection à appeler « chose » une pierre.

À mon sens il y aurait eu matière à présenter justement une thématique des choses excluant le végétal et l’animal. De tout temps – et en tout cas depuis que nous avons des œuvres d’art pour en témoigner – les hommes ont donné aux choses qu’ils utilisaient, qu’ils fabriquaient, dont ils s’entouraient, un sens symbolique, un surplus de sens. Cela est très bien montré d’ailleurs dans l’exposition dans la section « les objets de la foi » ou dans celle consacrée aux Vanités, un genre pictural que j’apprécie beaucoup.

Car il est temps que j’arrête de me montrer grincheuse, l’exposition est magnifique et la confrontation entre les époques, entre Chardin et Dali, entre Boltanski et les mosaïques de Pompéi, des plus stimulantes. J’ai été heureuse aussi de découvrir des peintres comme Adrian Coorte (Six coquillages sur une table de pierre, 1696) ou Sébastien Bonnecroy (Vanitas, 1641). Et comme je ne suis pas à l’abri de la contradiction, j’avouerai qu’un des tableaux que j’ai trouvé les plus beaux était la Coupe de cerises (1633) de Louise Moillon… (à mon avis ce sont des bigarreaux).

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