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Grains de sel
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Blog créé par l'Association pour l'autobiographie (APA) pour accueillir les contributions au jour le jour de vos vécus, de vos expériences et de vos découvertes culturelles.
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21 décembre 2021

Scènes de vie 2 !

Nadine P.

 Il y a quelques mois, en mai, je dressais une liste de mes scènes de vie du moment, scènes vécues parfois en spectatrice ordinaire, traces conservées sans aucune raison au demeurant, sauf le fait de les avoir tout simplement gardées en tête.

 

Mercredi : tram

Dans les transports en commun, les scènes se glissent souvent. Je les ai déjà invitées dans mes écrits. Cependant, peu de rencontres et d’échanges désormais, les téléphones accaparent la plupart des gens que je croise. Je ne révèle rien là de nouveau, hélas.

Deux jeunes s’installent sur les sièges qui me font face. Tenue réglementaire du dealer local : habits sombres — manteau à capuche large pour la rabattre plus facilement en cas d’approche suspecte - baskets confortables pour courir vite pour les mêmes raisons et besace, accessoire toujours en bandoulière. Rien n’est plus repérable que cette sacoche extra-plate. L’un des deux garçons presse les mains sur ce sac, je tente de ne pas laisser mon imagination aller plus avant.

J’ai envie de leur parler, envie de leur dire quelque chose, ils me désolent. Ils sont si jeunes, bien plus jeunes que mes fils. Ils parlent de leur compte en banque, heureusement que mes oreilles fatiguées ne saisissent pas tout, après la tristesse, j’aurais peur de m’énerver. Je sais où ils descendront, au même arrêt que le mien, chacun le sait. Je sais où, s’ils se transforment en « guetteur » du jour, ils s’installeront pour quelques heures avant que la relève arrive : là où je travaille, tout à côté. Je connais jusqu’au sifflet caractéristique, signal du danger qui approche, qui enclenche aussitôt leur départ en courant dans les tours ou les rues étroites.

En retraite, je n’aurai plus d’obligation de les voir. Cette pensée fugace et honteuse me traverse l’esprit alors que le tram nous mène. Ne pas voir, mais eux seront toujours là.

 

Jeudi : matin/salon professionnel

Stands en petit nombre – Tour de piste de visages connus, reconnus –, maisons d’édition ou associations tenant à se faire connaître, à tisser des liens avec nos structures.

J’apprends avec regret que la maison d’édition « La Renarde rouge » arrêtera ses activités poétiques en mars prochain. J’ai une pensée pour Joëlle Brière qui a tenu ses branches durant toutes ces années. Lui écrire, lui dire une fois de plus combien j’ai aimé ses mots, souvent. « L’Atelier des Noyers », enfant ou descendant de La Renarde, présente ses nouvelles parutions. Je craque pour « Gris de Payne » d’Allan Ryan. Ouessant et les flots, Ouessant poétique, facile de repartir avec ce cadeau que sans culpabilité aucune je garderai pour moi.

Jeudi : fin d’après-midi/Exposition « Arts de l’Islam. Un passé pour un présent ».

18 villes en France, 18 lieux pour accueillir ces objets, tableaux, cette mémoire. Pour une fois, la province fait partie de l’aventure. Dans ce cadre-là, j’ai assisté la semaine précédente à une conférence sur l’art en Afghanistan. Le spécialiste était si anéanti par les nouvelles du pays, qu’il a eu bien du mal en une heure à nous retracer ce qu’il avait prévu de partager. Il revenait en croisant connaissances historiques et témoignages, sur ce qui est et ce qui attend le pays. Il s’en est excusé, le trouble était mis en commun, mais son poids personnel pas plus allégé.

Avec une amie nous découvrons ce jeudi les objets exposés, certains hélas seront déposés en fin d’exposition dans les réserves et plus jamais présentés. L’exposition comme parfois est plus minimaliste que le laissent à penser les affiches placardées dans toute la ville et la communication débordante. Cela n’empêche pas la qualité, mais nous laisse un soupçon de regret.

Dans le brouillard les illuminations percent à peine, nous nous engouffrons dans un bar tout proche.

Un Kir, le sourire de la serveuse.

On est bien.

 

Vendredi : achat d’un téléphone

Depuis un an et demi, je repousse cette dépense. Prévue, anticipée de loin, elle me perturbe au plus haut point. Voilà, c’est fait : Google envahit mon espace vital, me demande si je veux faire plus, si j’accepte plus et, tel un mauvais homme avec des intentions toutes aussi mauvaises, il ne me laisse pas le choix. Le droit de dire « non » ne s’applique pas pour tout !

 

Samedi/dimanche : braderies de livres

Médiathèques, deux établissements de la ville ce même week-end ont décidé de nous gâter. Car ce sont bien des cadeaux trouvés là. 1 €/un ouvrage au choix. Qualité du contenu et de l’état des livres.

Véritables gourmandises : recueils de poésie, livres de photos, dictionnaires, livres d’art dont Botticelli, Hokusai, documentaires sur la philatélie ou les chemins de fer de la région, etc. Depuis 1945, une de ces bibliothèques n’avait pas fait de « désherbage » de ses collections !

Mon caddy se remplit de courses particulières. Je suis déjà dans « l’après-travail », j’anticipe le moment où je ne pourrai plus arpenter les travées en me levant seulement de mon siège pour me saisir de quelques ouvrages pour accompagner ou illustrer les ateliers d’écriture que j’anime dans un de ces lieux. Je choisis également des livres pour mes collages futurs. Le pilon des bibliothèques évite qu’on culpabilise à outrance de découper les livres, permet de dédramatiser. J’ai appris durant toutes ces décennies à savoir quoi en penser.
Échanges bienveillants avec les bibliothécaires, ambiance feutrée, mais pas guindée, le calme règne. Dehors, la queue des curieux s’étire. Aucune précipitation, aucune empoignade : la lecture intime et future emplit sans doute les esprits sereins de son rythme lent et respectueux !

Tout va bien.

 

Semaine :

La roue tourne.

Installée depuis quelques jours, elle tourne « à vide » ce matin, comme chaque matin.

Il est tôt pour qu’enfants et grands s’y installent.

Elle tourne, le soleil émerge derrière les immeubles.

Le froid est vif.

C’est magnifique.

Je la regarde tourner, rondement, sans à-coup,

se décrocherait-elle pour remonter le boulevard,

je la suivrais.

 

Samedi : soirée avec des amis

Comme c’est bon !

On trinque, on mange de bons plats, on rit, on oublie les heures, on oublie les soucis du lendemain.

On est bien.

La Covid ?

L’amie qui n’est pas vaccinée a renoncé à venir.

Une pensée : si la pandémie dure 4 ans encore, quand la reverrais-je ?

 

Dimanche :

Je décore mon sapin. Sapin bio du Morvan, livré en ville par triporteur. Même si certains râlent qu’on coupe des arbres pour l’occasion, je sais comment ils travaillent, ce qu’ils font. Pourtant les prix augmentent, la taille du sapin diminue, jusqu’à quand pour garder mon sapin, garder mon geste « citoyen »  ?

Boules rouges, tissus bordeaux sur le canapé, corbeille remplie de perles dans les tons.

Je suis bien.

 

Prenez soin de vos moments, de vos scènes légères ou anodines. Plantez-les dans un terreau où elles donneront leur meilleur. De banales, elles se transformeront parfois en souvenirs.

Bibliographie

  • Inspiration de Paul de Roux, Au jour le jour, carnets 1974-1979 © Le temps qu'il fait, 1986

Internet

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