Dans la roue du Petit Prince par Yannick Billard

Élisabeth Gillet-Perrot

Dès l’abord, l’auteur nous met dans l’ambiance en s’adressant au célèbre aviateur : « Monsieur de Saint Exupéry, je crois que j’ai retrouvé le petit prince… tout a commencé en ouvrant votre chef-d’œuvre, mes trois enfants blottis contre moi, tout ouïe ».

La lectrice que je suis se régale alors du dessin d’un serpent boa ayant avalé un vélo.

À l’été 2019, Yannick et Marie-Hélène Billard quittent Chambéry à bicyclette avec leurs trois enfants de 7 à 12 ans, Amandine, Coline et Simon. Le voyage les conduira par les cols pyrénéens, les montagnes de l’Atlas et le désert de Mauritanie, jusqu’à Bignona, en Casamance, six mois de route et 7000 kilomètres.

Ce n’est pas sur un coup de dés que ces deux parents décident d’effectuer ce voyage au long cours, mais c’est la suite de longues années de travail collaboratif avec les Sénégalais chez qui leurs vélos vont les porter en famille. Au début du livre, une carte en noir et blanc permet de bien voir ce fabuleux trajet.

Ils ont déjà fait auparavant en vélo le voyage « de Chambéry au Cap de Bonne-Espérance », qui a fait l’objet d’un autre livre édité par Les artisans voyageurs.

Marie-Hélène est éleveuse de moutons. Yannick se rend au Sénégal au moins deux fois par an pour accompagner des projets internationaux de développement dans la région de Bignona, tout au sud du pays. À l’arrivée, ils sont accueillis à bras ouverts par la chaleureuse famille des gens avec qui Yannick travaille depuis si longtemps. Leurs enfants en connaissent certains venus aussi à Chambéry et Simon, Coline et Amandine sont habitués à la joie de vivre des Sénégalais.

Le voyage a été longuement préparé. Tous les soirs en rentrant du boulot, Yannick colle des gommettes sur un planisphère et sélectionne sur des cartes à grand format en « stabilott[ant] les véloroutes et les voies cyclables » en France, en Espagne et au Portugal, au Maroc et en Mauritanie. Le trajet en autocar à travers le Sahara occidental,de Guelmine à Gargarate, sera en autocar — avec une halte à Tarfaya, où un musée rappelle « Cap Juby », l’escale de l’Aéropostale où séjourna St-Ex.

Le récit multiplie les références : on navigue entre la réalité des étapes à vélo et les paroles si poétiques du petit prince. Il est agrémenté de photos en couleur des rencontres que fait la famille. Yannick nous fait partager ses émotions, 

Ma rose ferme la marche…

Ma rose est amoureuse…

Ma rose a des épines…

Ma rose a besoin de tendresse…

et aussi le regret d’avoir laissé en Savoie son père trop malade pour les rejoindre à Noël comme prévu. Surtout, les très riches échanges que cet attelage atypique partage avec les habitants des différents pays traversés sont au cœur du livre.

Dans la roue du petit prince a reçu le prix du livre d’aventure des Angles. Et il est d’une richesse telle qu’il m’a donné envie de lire le précédent : De Chambéry au Cap de Bonne-Espérance, à vélo de 2005 à 2006, un voyage solidaire.

PS : pour la petite histoire, j’ai moi-même, il y a quelques années pu constater la joie de vivre des Sénégalais lors d’un séjour à Dakar.

Internet

• Transboréal