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Grains de sel
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Blog créé par l'Association pour l'autobiographie (APA) pour accueillir les contributions au jour le jour de vos vécus, de vos expériences et de vos découvertes culturelles.
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6 décembre 2021

Chroniq’hebdo | De la violence, de la vieillesse, de l’écriture et autres considérations

Pierre Kobel

cinetv-amour_a_mortTard dans la soirée. À la télé un documentaire Amour à mort relate des témoignages de femmes battues qui ont vécu une histoire traumatique de couple jusqu’à être menacées dans leur vie. Auparavant diffusion du film Jusqu’à la garde qui reste une des meilleures illustrations de ce sujet si présent dans la société contemporaine. Je ne découvre rien, mais je suis toujours effaré d’entendre ces récits épouvantables qui disent les distorsions des esprits masculins, l’épuisement et la peur des femmes.

Homme, je suis parfois agacé par les propos de certaines femmes, interrogé par leurs dénonciations, leurs revendications et dans le même temps, je suis plus encore révolté par l’incapacité globale de la société à refuser ces violences, à reculer pour prendre toutes les mesures nécessaires propres à y mettre fin.

Je ne cesse de penser à des moments de ma vie traversés de violentes colères même si elles étaient loin de cela. Mais ce documentaire m’y ramène.

*

20211129gds-mots-pkobel_chroniq_hebdo3_demon_de_la_colline_aux_loupsJ’ai lu Le Démon de la colline aux loups de Dimitri Rouchon-Borie, précédemment évoqué. Un premier roman coup de poing. Il donne la parole à Duke, le personnage dont le récit constitue ce livre, entre horreurs et tentative de rédemption. « J’ai pleuré à cause des oiseaux qui étaient minuscules ils vivaient dans des îles où je n’irai pas. […] Et j’ai pleuré car je me disais que la vérité était là dans ces oiseaux et que moi j’étais avec des hommes qui se débattaient dans leur vie et qui ne feraient jamais cette perfection-là et j’ai hurlé à l’intérieur en demandant au Démon qu’il fasse de moi un oiseau. », « […] imaginez-vous sous l’eau de puis le jour de votre naissance à retenir votre respiration en attendant une bouffée d’air qui ne vient pas ma vie c’est ça. », « J’ai dit les hommes sont des choses vides et des fois leur vie se remplit de bien et des fois de mal et des fois c’est partagé et ça fait une lutte. »

*

Terminé cette semaine Le tiers temps de Maylis Besserie, roman qu’elle consacre aux derniers mois de Samuel Beckett dans la maison de retraite où son état de santé l’avait conduit. J’y puise une exécration grandissante de ces lieux de de fin de vie où la déchéance, la dépendance prennent toute la place quand l’esprit voudrait qu’on lui foute la paix ! « On croit toujours que ça file, mais c’est interminable. Combien de temps tout cela va-t-il encore durer ? Personne ne sait. Tu n’aurais pas parié cher sur ta propre durée. Pourtant tu n’en finis pas. Malgré tout. » Et plus loin cette perspective qui me fait horreur : « Ne sais-tu pas que la descendance est cruelle ? Qu’elle s’empare du corps familier du malade, du père ou de la mère, et qu’elle l’étouffe ? Ou, pire, rêve de le faire ? » On peut ne pas être d’accord avec ce point de vue, penser que c’est à l’image de l’atrabilaire qu’était Beckett, mais, soyons honnêtes, qui ne peut pas y voir un peu de vrai ?

Je pense à ma mère, à son grand âge, son corps usé, l’éloignement de son esprit, de ses souvenirs, à l’attente inéluctable de sa fin que je ne souhaite pas. Mais pour le reste, oui nous avons mis son existence sous emprise, nous en sommes devenus les gestionnaires. Avec son consentement certes, mais quelle part de renoncement en même temps ?

Dans ce que Maylis Besserie prête à Beckett, il y a du sarcasme, un humour libérateur, il y a du narquois, du pas dupe et parfois les mots qui sauvent. Mais jusqu’où, jusqu’à quand lorsque nous ne devenons plus qu’un corps médicalisé ?

*

En lisant ces livres, j’éprouvais ce qui arrive parfois durant certaines lectures. Au fil des pages, j’étais renvoyé à d’autres pensées, des questions survenaient, des envies d’écrire, il aurait fallu que je dissocie mon cerveau pour pouvoir d’une part poursuivre ces lectures qui m’interpellaient et d’autre part répondre à ces interpellations sans rien en perdre. Et c’est là que je suis revenu au poids des mots autant qu’à leur vanité, leur éphémère utilité. Les mots, parfois je pense à eux comme à ces coups de poing, coups de pied qu’on met dans une porte qui ne veut pas s’ouvrir. Mais une fois qu’elle est ouverte, on ne sait pas où aller et à quoi bon.

J’ai besoin des mots. Écrire ici le prouve. Je ne suis pas désespéré, mon existence a encore un peu de temps, je ne suis pas seul et j’ai encore quelques chantiers à avancer. Mais je suis sans illusions. Nous ne sommes que des passants.

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bib-chere_apaJe repense au Chère APA de Françoise Bonnot-Jörgens. Il n’y a rien de narcissique à de telles plongées dans sa propre existence. Elles participent du socle sur lequel nous essayons de nous construire, du moins de tenir le coup face au réel. Se mettre en perspective du temps passé, c’est une façon de faire face aux questions par rapport à soi et quant à un environnement si mouvant et si incertain qu’il ne peut qu’inquiéter.

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cine-illusions_perduesJe suis allé voir hier Illusions perdues de Xavier Giannoli, adaptation du roman de Balzac. Je n’ai jamais été un grand lecteur de ce dernier. Souvent les livres de ce dernier me tombaient des mains quand j’étais adolescent et j’en ai conservé une certaine prévention à son encontre, ce qui est certainement une erreur qu’il me faudrait corriger. Le film est superbe. De vrais décors, une véritable ambiance et des personnages forts interprétés au mieux par des acteurs dont les talents se conjuguent pour former un récit choral. Une autre qualité du film, ce sont les échos modernes qu’il éveille tant il renvoie à notre société contemporaine et aux jeux de pouvoir que nous subissons.

*

logo_chroniqhebdo2J’ai commencé déjà à bâtir les prochaines Chroniq’hebdo. Projets pour ne pas me laisser rattraper par le temps. J’aime m’inscrire dans cette régularité périodique. Si elle n’est pas un rendez-vous pour les autres, elle l’est pour moi et je me dis que ces contributions sont à l’image – sans prétentions ! – de ce pour quoi ce blog existe. Il atteint ces jours prochains la 300publication. En un peu plus d’un an, je ne peux m’empêcher de croire que c’est un beau résultat. À me promener dans ces pages, à en relire certaines, je sais que l’entreprise a déjà réussi.

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Et hop ! C’est reparti ! Un nouveau variant du coronavirus apparaît en Afrique australe et la ronde des spécialistes et des commentateurs repart avec ses hauts et ses bas, ses avis divergents, voire contradictoires. L’un inquiète, l’autre rassure et nous ne sommes plus qu’une opinion publique malmenée, menée par le bout du nez, une intelligence tordue, vrillée, rabaissée à force d’agressions verbales. Mais ces mêmes médias que je critique et dont je ne sais pas me passer, ne sont-ils pas les premiers à être manipulés eux-mêmes par d’autres forces, celles de l’argent et du pouvoir ?

Donc un nouveau variant, Omicron, et des inquiétudes, des questions quant à l’avenir. À court terme : pourrons-nous fêter Noël en famille ? À long terme, qu’allons-nous devenir ? La société va-t-elle tenir le coup ?

*

Le week-end dernier, mon fils a fait la SaintéLyon, une course de plus de 78 kilomètres. Course nocturne entre Saint-Étienne et Lyon qu’il a fait en 13 h 30. Fada ! suis-je tenté de dire. J’admire la performance en même temps que je m’inquiète pour sa santé. Il me disait qu’il avait l’impression qu’un camion lui est passé dessus après ces heures dans la nuit, le froid et la neige.

Aujourd’hui que je vieillis, qu’ai-je raté de l’existence ? Celle que je mène se partage entre libertés conquises et contraintes récurrentes. Ma sagesse n’est que mirage. Au fond de moi, il n’y a que désirs et dépassement de soi. Depuis l’enfance j’ai toujours voulu être Zorro.

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