Chroniq’hebdo | D’un petit frère, de l’APA, de la butte Bergeyre et de Virginie Despentes
Pierre Kobel
Dans la suite de ce qui concluait ma précédente chronique, je veux revenir à la place que prend l’autobiographie dans la BD en évoquant un album très réussi que je viens de lire : Le petit frère de Jean-Louis Tripp. Il y raconte comment, en août 1976, durant des vacances bretonnes et familiales en roulotte hippomobile, ce petit frère âgé de 11 ans a été fauché par une voiture et est mort quelques heures plus tard. L’auteur revient à cet événement tragique, 45 ans après, pour en faire un récit émouvant, mais sans aucun pathos, et dire comment il a profondément marqué depuis ses proches et la vie familiale. La plus grande partie de ce gros album de plus de 300 pages est réalisée en noir et blanc et il ne retrouve la couleur que pour sa conclusion. Histoire d’un drame difficile à partager avec ceux qui n’en ont pas vécu de semblable, d’un deuil long à surmonter. Jean-Louis Tripp parvient par la justesse de son propos introspectif et de son trait à la rendre accessible à tous au-delà de ce qu’elle a de personnel.
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Grains de sel a pris une vitesse de croisière estivale. Peu de contributions depuis le début du mois, mais nous avons allègrement franchi le cap des 500 billets à la fin juillet, signant par là la vitalité de ce blog.
Au-delà c’est la vie de l’association qui se projette dans l’avenir avec la prise de fonction prochaine d’une nouvelle personne à Ambérieu et la rédaction par Bernard et quelques amis d’un document propre à promouvoir notre souhait commun de voir se créer un jour futur une Maison de l’Autobiographie. Comment ne pas y croire ? Si le cœur de notre sujet sont la mémoire et les souvenirs, ils n’ont d’intérêt que par leur inscription dans une chaîne du temps qui ne s’arrête pas à eux, mais va de l’avant et établit des passerelles avec le présent et l’avenir. Notre propos ne tient pas de la nostalgie, mais d’une plongée vivante dans les remous de l’existence, dans une réflexion permanente propre à assurer la continuité et le renouvellement enrichi de ce passé. Avoir un lieu à soi, ce n’est pas se refermer dans l’exclusivité de notre centre d’intérêt, mais se donner la possibilité d’assurer la transmission aux générations à venir et contribuer à l’expérience humaine.
Une expression entendue à la radio, qui me parle : « Le chahut de la mémoire. »
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La mémoire c’est aussi celle des villes. Encore des promenades dans ce Paris que nous aimons. Découverte de la butte Bergeyre, quelques rues à l’écart de la cohue à proximité des Buttes-Chaumont. Un autre jour, visite renouvelée du musée de la Vie romantique dans le quartier de la Nouvelle Athènes. Une belle maison au bout de son allée, la présence prégnante de George Sand qui nous si chère, parmi d’autres. Un voyage dans l’histoire de la peinture et de la littérature.
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Littérature, j’y reviens en lisant dans Télérama un entretien avec Virginie Despentes. Alors que sort son nouvel opus, Cher connard, un roman épistolaire qui explore les relations entre les hommes et les femmes et les bouleversements que notre époque metoo provoque. Depuis que je la lis, je sais que Despentes est une grande écrivaine. La femme qu’elle est est loin de moi. Elle devrait me déranger alors qu’elle me pousse à réfléchir, à me questionner, à repenser l’homme que je suis.
Internet
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Wikipédia | Jean-Louis Tripp
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Casterman | Le petit frère
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Wikipédia | Butte Bergeyre
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Wikipédia | Virginie Despentes