Chandeleur, ou le jour de la marmotte
Catherine Bierling
Quand février pointe son nez, je repense à ce film, qui s’appelle en anglais « Groundhog Day », le jour de la marmotte, connu en France sous le titre « un jour sans fin » (Etats-Unis, 1993)
C’est l’histoire d’un présentateur météo, Phil, joué par Bill Murray, arrogant, cynique et désabusé, envoyé par sa chaine de télévision assister au « jour de la marmotte » dans la petite ville de Punxsutawney en Pennsylvanie. Ce jour-là, parmi les autres réjouissances organisées, on sort la fameuse marmotte de sa cage pour observer si elle projette ou non son ombre. Si c’est le cas, l’hiver durera encore six semaines.
Mais l’histoire tourne plutôt autour du très antipathique journaliste, accompagné de sa productrice Rita (Andy MacDowell) et de son cameraman, auprès desquels il montre au grand jour son caractère absolument insupportable.
Une énorme tempête de neige se déclare et contraint l’équipe à passer la nuit dans la petite ville. Mais quand Phil se réveille le matin suivant, à sa grande stupéfaction, le réveil indique toujours le 2 février.
Ainsi doit-il pour un temps indéterminé revivre chaque jour la même journée dans cette ville qu’il déteste en compagnie de personnes auxquelles il se croit supérieur. Jusqu’à ce que… il ne faut pas « spoiler » (les Québécois ont inventé : divulgâcher) la fin, même si le film est largement connu !
Chaque année, les longueurs de janvier et février me donnent l’impression de revivre moi aussi un jour sans fin, ou bien « un jour de la marmotte. »
Mais jamais plus qu’en ce début d’année 2021, où tout semble effectivement se répéter sans fin et tourner en rond. Les nouvelles se suivent, se contredisent, se concentrent sur le nombre d’infections et de morts qui font du yoyo chaque pays. Qu’ils confinent ou qu’ils déconfinent, envoient leurs enfants à l’école ou les en retirent, ouvrent leurs restaurants ou les referment, barricadent leurs frontières ou les laissent entrouvertes, vaccinent ou sont en attente de vaccins, rien ne semble avancer vraiment.
Comme si nos emplois du temps restaient figés sur la répétition des mêmes tâches, mêmes gestes, rituels, pensées, espoirs, déceptions…
Ce que j’aime cependant dans ce film, c’est qu’il est porteur d’un message positif. Phil, à force de répéter la même journée, apprend énormément et finit par mettre à profit cet arrêt soudain du carrousel pour devenir un personnage plus mûr, plus cultivé, plus empathique et plus fréquentable.
Je me prends à rêver que ce temps qui coule trop lentement à mon gré, je pourrais aussi l’utiliser sans râler, à apprendre une nouvelle manière d’appréhender la vie. Tirer profit de ce gel du temps, contrainte parfois si lourde à supporter.
Se répéter, comme un mantra : « Que comptes-tu faire du temps qui t’est accordé ? »
Dans mon enfance, le deux février c’était le jour où l’on faisait des crêpes et qu’on appelait la Chandeleur. J’ignore la signification liturgique de ce terme, mais j’en aime la sonorité. Il y a des chansons, de la chandelle, des lueurs et de la chaleur dans ce mot.
Alors imaginons que la marmotte se réveillera bientôt pour nous prédire un printemps plus rassurant, et que la lumière reviendra peu à peu, nous rendant espoir et optimisme…
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