Sous les Figues, au lieu de voter
Abdellaziz Ben-Jebria
Ce samedi dernier, 17 décembre 2022, furent les élections mascarades des députés au parlement tunisien, ou chambre des représentants du peuple, comme on voulait l’appeler ; c’est plutôt la future chambre des figurants, sans pouvoirs réels. Alors, comme mon épouse et moi avions décidé de ne pas participer à cette humiliation du pays devant le monde entier, nous avons choisi, ce jour-là, d’aller voir le film Sous les Figues de la réalisatrice tunisienne Erige Sehiri. Merci à Pierre de me l’avoir suggéré.
Nous avons choisi d’aller au cinéma le plus pratique pour nous, Les 7 PARNASSIENS, sur le boulevard Montparnasse. Nous avons déjeuné préalablement dans un petit resto thaï, sympa, propre, pas cher, et où on est servi par une jeunesse élégante. Il se trouve juste à l’entrée gauche de cette Galerie marchande qui abrite le cinéma en question.
Quant au film, bien qu’il ne soit ni impressionnant dans sa production, ni spectaculaire dans le divertissement, je l’ai apprécié personnellement pour ses scènes réelles qui reflètent un vrai vécu de ce genre de cueillettes, même si elles ressemblent peu, dans leurs ambiances quotidiennes, à celles de mes propres olivaisons du Sahel que je trouve plus joyeuses.
J’ai beaucoup aimé la mise en scène et l’élégance des dialogues, plus particulièrement les rudes conversations de jalousies entre filles, et leurs causeries suggestives avec des regards insinuant l’amour pour leurs camarades masculins.
Mais, la scène qui m’a le plus saisi est celle de la femme âgée (je crois Hneya) qui contrôle la mise en place des figues dans les cageots en plastique. Elle est tellement contrariée par son présent mariage qu’elle avoue aux jeunes filles qu’elle n’aime pas son actuel mari, et qu’elle aurait préféré épouser son amoureux lors de sa jeunesse. Et pour apaiser sa douleur nostalgique, elle leur offre un chant de lamentation sur son passé, d’amour sur sa jeunesse et de liberté sur le présent.
J’ai aussi apprécié le charme de la combattante (je crois Fide) qui, après s’être disputée avec une de ses copines jusqu’à se moquer de son conservatisme archaïque, finit par la consoler de son chagrin et fait la paix avec les autres en repoussant énergiquement son pseudo-amoureux par solidarité d’émancipation féminine. D’ailleurs, contrairement aux garçons, ces jeunes filles retourneront à leurs études après ce travail saisonnier de vacances estivales.
J’ai enfin aimé le bon savoir-vivre de ces jeunes filles qui, après une journée de travail, prennent le temps de se maquiller pour apparaître encore plus belles, avant de retourner chez elles ; et chemin rentrant, elles chantent joyeusement ensemble sur le camion qui le transporte. Quelles belles leçons pour les garçons !
Au final, ce film relate bien une des réalités politiques, sociales et économiques de l’actuelle Tunisie qui est traînée dans la boue par des ignares hypocritement religieux et populistes, depuis la pseudo-révolution, et même avant. Nous avons donc bien fait de voir ce film au lieu de voter pour une cause perdue d’avance avec, au bout du compte, 10 % des votants.
Internet
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Wikipédia | Politique en Tunisie
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Allociné | Sous les figues