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Grains de sel
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Blog créé par l'Association pour l'autobiographie (APA) pour accueillir les contributions au jour le jour de vos vécus, de vos expériences et de vos découvertes culturelles.
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4 octobre 2023

Sous le voile

Nadine P.

logo_sexualite      Je ne sais quand envoyer mon billet. C’est là que mon hésitation rejoint la pudeur du thème, de l’appel d’écriture proposée. Puis Pierre écrit qu’il n’y a pas preneur, alors je me lance : il faut bien une première, un premier et les autres suivront.

Je regarde ce qui surgit quand je soulève le voile.

« C’est quoi la masturbation ? »

Ma mère, assise en train de tricoter, s’est arrêtée tout net et a failli en avaler ses aiguilles !

Une brève et laborieuse explication s’en est suivie, c’est ce dont je me souviens. Elle, je la revois clairement. J’ai retenu que c’était mal, qu’il ne fallait pas le faire et une définition concrète qui était « c’est se toucher le corps », les mots employés. Ne connaissant au moment du questionnement rien sur les plaisirs de la chair et encore moins sur ceux qu’on peut s’offrir à soi-même, j’ai pris le mot « toucher » pour ce qu’il était, l’interdit total sans savoir à quel contact désormais j’avais droit. Dans le doute, inexistant d’ailleurs, autant ne rien effleurer ! J’ai donc appliqué la consigne à la lettre : de longs endormissements où je faisais bien attention de ne toucher aucune partie de mon corps, bras écartés, mains bien éloignées et agrippées au bord du lit afin de rester dans ce qui est autorisé. Je ne sais pas combien de temps ça a duré.

Dans la sexualité il y a aussi les chocs.

« Trois jours après, quand tu nous l’as dit, c’était trop tard… » C’est la réponse que j’ai obtenue des décennies plus tard quand ma mémoire s’est enfin ouverte à nouveau et que j’ai demandé à ma mère pourquoi ils n’avaient pas déclaré mon agression à la gendarmerie. Trop tard, je me contenterai de ce constat.

Trois personnes de ma famille sur quatre générations ont subi des agressions sexuelles, rien d’étonnant vues les statistiques. Être en dehors du lot, ça ne nous aurait pas dérangées.

Et du beau, du doux, de l’aventure à deux.

L. était d’une beauté ténébreuse à tomber. J’avais peu d’expérience et la première n’aurait pas pu figurer dans le top du bonheur pour en retirer de quoi maîtriser le sujet. Lui n’avait pas dit à ses copains bien évidemment qu’il était vierge. À moi, si !

On ne parle jamais des « hommes vierges », j’ai vérifié on peut vraiment le dire, et vis-à-vis des « potes » on doit tout faire pour le cacher.

Normes dans la sexualité ? Elles changent de génération en génération, mais il y en a bien qui s’immiscent dans l’intimité. Je me souviens avoir cherché à une période de ma vie, s’il était normal de faire l’amour tant de fois par semaine, par mois, cherchant des réponses là encore à des questions intimes qu’on évoque guère ou pas du tout entre ami(e)s.

J’imagine les gamin(e)s à présent ne formulant qu’une question simple sur Internet et la multitude de réponses obtenues. Sans doute pas que des bonnes.

Du beau, du doux, une première nuit nous deux dans une tente canadienne orange, nos souffles plus que des bruits, les copains-ines ne sont pas loin.

Un tendre et long morceau de vie commune s’en est suivi, de quoi pleurer quand j’ai appris sa mort brutale récemment, même si je ne savais plus rien de son chemin de vie.

C’était une époque où la jalousie n’existait pas, ne devait pas exister, se montrer surtout. Ami(e)s parfois se transformaient en amantes, amants d’un soir sans que cela n’influence les relations par la suite. Enfin, c’était ce qu’on se forçait à croire ! Afin d’éviter tout malentendu futur, j’avais envoyé le texte de la chanson « Entre l’amour et l’amitié » d’Henri Tachan à un ami après une soirée différente des autres. Pas sûre que nous en ayons eu la même lecture.

Que dire de la sexualité organisée, celle qui se heurte à l’envie d’enfant qui ne vient pas ? Celle qui se retrouve au rang de technique de procréation, et pour cause, mais nous fait basculer dans des temps reculés : faire l’amour pour avoir l’enfant, na ! Et que penser des temps scientifiquement avancés et de leurs paires vous lançant des propos du genre « Ne vous inquiétez pas, on s’occupe de tout ! » Prendre la température « comme il faut » quand vient le moment du mois où il faut en passer par là. Oublier ou tenter de ne pas penser au pourquoi on le fait ce soir obligatoirement, pas de répit, alors que ce soir-là on aurait bien pris un bon bouquin et laissé venir les choses doucement, l’amour complice et le lit comme refuge le lendemain, ou après-demain.

Combien de belles histoires se sont arrêtées là ?

20231004gds-vie_npic_sous_le_voile

 

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