Chroniq’hebdo | De la tristesse, de quelques lectures, de la mort

19 février 2024

Chroniq’hebdo | De la tristesse, de quelques lectures, de la mort

Pierre Kobel

Dans la nuit de mon refuge, il y a de la musique brésilienne, douce et magique pour accompagner une semaine triste et difficile. Je voudrais trouver les mots justes pour dire ici ce que je ressens, mais ils ne seront jamais à la mesure de ce que j’éprouve au plus profond de moi, que je ne peux communiquer à personne.

De quelques lectures. D’abord un très amusant petit livre de Laure Murat, Flaubert à la Motte-Picquet qui raconte sa quête des lectures des autres dans le métro. C’est un exercice auquel je me livre parfois avec curiosité, mais sans aller jusqu’à noter ce que je vois. Laure Murat s’attache plus aux livres qu’aux lecteurs, mais il y a là toute une sociologie à établir qui reflète une pratique culturelle encore importante en France malgré le pourcentage conséquent de personnes qui ne lisent jamais. Je m’étonne toujours d’être un grand lecteur avec la lecture de plus de vingt livres par an, ce qui me paraît si peu et qui semble énorme pour d’autres.

Lecteur de BD, je ne suis pas féru de fantastique, mais j’ai depuis longtemps une addiction particulière pour la série Thorgal. J’ai lu le dernier opus de la saga, un « one shot » comme on dit. Un hommage de Corentin Rouge et Fred Duval au personnage. Wendigo raconte ce qui est à la fois une quête, un combat dans l’esprit de la série. Mais là où parfois elle se perd un peu dans des traverses ésotériques au fil des titres successifs, ce volume est une réussite de grande qualité tant le scénario que le dessin. Il y a une cohérence et une variété de l’aventure du début jusqu’à la fin, une utilisation multiple des cadrages. C’est un des meilleurs Thorgal que j’ai lu.

Je suis aussi en train de lire la biographie de Blaise Pascal qu’a écrit mon ami Bernard Grasset. Pascal aimait méditer en se promenant ce que fait aussi Bernard et cette plongée dans la vie du premier est très éclairante tant elle ajoute à la connaissance du personnage par la richesse de la documentation qui se glisse dans un récit fluide et littéraire.

Heureusement que ma semaine a été accompagnée par ces lectures, car ce fut aussi une semaine douloureuse. Un de mes fils m’annonce la mort de sa grand-mère maternelle. Cela me fait drôle. C’est une page qui se tourne avec la disparition de cette vieille dame de 103 ans que j’ai fréquentée durant un quart de siècle. Si logique que soit sa disparition, elle avait atteint un âge qui lui conférait comme une certaine immortalité.

Comme si cela ne suffisait pas, j’apprends la mort de Bernard Ascal. Son épouse Françoise m’écrit qu’il est mort en douceur et avec amour. Depuis que nous nous connaissions, nous avons eu une relation amicale. Nos liens tenaient à la musique, à la littérature et à la peinture. Bernard fut musicien, parolier, compositeur, peintre. Homme à la curiosité tous azimuts, des arts comme de tout ce qui est la vie, il accompagna l’aventure de beaucoup d’autres artistes en tant que directeur musical des éditions EPM quand il ne les chantait pas lui-même. Je pense à la réalisation magnifique du Cahier d’un retour au pays natal d’Aimé Césaire en 2 CD. Cette mort de Bernard m’attriste profondément et je pense à Françoise dont j’aime tant l’écriture, à Gaël, leur fils qui a si souvent collaboré avec son père.