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Grains de sel
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5 janvier 2023

La famille, comme l’or, est-elle aujourd’hui une valeur refuge ?

 André Durussel

20230105gds-liv_adurussel_la_famille_comme_lorAu lendemain des rencontres de famille de l’année 2022, ainsi celle du jour de Noël à Jongny pour l’auteur de ces lignes, j’ai relu un roman de François Mauriac (1885-1970). Dans sa quarantième année, il publiait chez Bernard Grasset en 1925 Le Désert de l’amour. C’est un constat désabusé de la vanité des passions humaines, mais pas uniquement cela.

 Dans François Mauriac romancier, Edmond Jaloux donnait, en 1933 déjà, un substantiel résumé de ce roman qui avait reçu le grand prix de l’Académie française, malgré la réaction négative de la presse catholique, cabrée contre Mauriac depuis ses premiers livres. Au terme de ses propos, il relève ce passage qui fait l’objet de ce présent article. Il s’agit de l’aveu que fait le docteur Courrège à son fils Raymond dont ils ont en effet aimé la même femme, nommée Marie Cross :

 Tu ne saurais croire comme il fait bon vivre au plus épais d’une famille… mais oui ! On porte sur soi les mille soucis des autres ; ces mille piqûres attirent le sang à la peau, tu comprends ? Elles nous détournent de notre plaie secrète, de notre profonde plaie intérieure ; elles nous deviennent indispensables… Tu vois : je voulais attendre la fin du Congrès, mais c’est plus fort que moi : je vais prendre le train de huit heures, ce matin… L’important, dans la vie, c’est de se créer un refuge. À la fin comme au commencement, il faut qu’une femme nous porte.

  Familles, je vous hais !

 Le Désertde l’amour est-il un roman d’hommes, entre hommes ? Et que faire aujourd’hui de cette déclaration d’André Gide, extraite des « Nourritures terrestres » : Familles, je vous hais. Foyers clos ; portes fermées ; possessions jalouses du bonheur… ?

 Or, il n’y a peut-être pas plus de raisons, aujourd’hui comme hier, à vilipender la famille ou à l’encenser ? Elle est en effet et sera toujours le creuset dans lequel nous nous développons et nous existons, nous faisant ainsi ce que nous sommes, comme le précisait Daniel Mercier en décembre 2013 dans son Café Philo Sophia. Une autre raison nous est proposée par Luc Ferry dans son essai de 2007 intitulé : Familles je vous aime. Politique et vie privée à l’âge de la mondialisation. Certes, nous ne sommes plus à l’époque de François Mauriac. La famille n’est plus le lieu privilégié de l’apprentissage de la vie sociale et cette tâche a été transférée à l’école. La famille est ainsi devenue le lieu où se situe la quête du bonheur individuel de chacun de ses membres la composant (ou la recomposant), jouant ainsi ce rôle de refuge face aux difficultés de la vie. Celui qu’il faudrait se créer selon le docteur Courrège.

 Dans la volumineuse Biographie intime en deux volumes consacrés à François Mauriac par Jean-Luc Barré en 2010 chez Fayard, le biographe nous expliquait avec raison qu’il n’y avait aucun lien direct dans la vie de l’écrivain bordelais et de son fils Claude avec cette rivalité amoureuse romanesque, opposant le docteur Courrège et son fils Raymond. Il le précise ainsi :

 Bien que trop absent ou trop accaparé par son œuvre en cours de rédaction pour être un mari modèle ou un père irréprochable, l’écrivain paraît entretenir avec sa femme Jeanne, alors enceinte d’un quatrième enfant (son second fils Jean) une relation heureuse et sans accrocs.

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 Le docteur Courrège, qui avait cru trouver dans son amour pour Maria Cross un substitut au « désert » qui le sépare de sa femme et de ses enfants, n’a rien fait d’autre, en définitive, que de rêver ses débauches, tandis que son fils, épris sans le savoir de la même femme que lui, prend brutalement conscience de la vanité d’une carrière de séducteur.

  Au plus épais d’une famille, ou alors son inverse : la solitude ?

 Au terme de ces quelques propos autour d’une œuvre d’autrefois, il y a peut-être lieu de préciser que cette épaisseur bienfaisante d’une famille, qu’elle soit réduite à celle d’un couple âgé, voire monoparental ou communautaire, n’est jamais un véritable désert. Il y subsistera toujours, à mon avis, quelques reflets de l’amour. Or, bien plus difficile à assumer dans la durée, c’est le fait de n’avoir plus (ou jamais eu) une véritable famille. D’être seule ou seul. Personne avec qui pouvoir partager ses repas, ses impressions, ses lectures, cela peut devenir un véritable désert, sauf s’il est éclairé par la fidèle présence d’un animal de compagnie.

 Dans un très récent ouvrage, intitulé : L’Avancée en âge, ses richesses et ses écueils (Ed. de l’Aire, Vevey, octobre 2022), Marianna Gawrysiak situe très précisément ces deux formes de la solitude : celle qui est acceptée de plein gré et celle qui est subie. Vingt-huit personnalités de Suisse, ayant franchi le cap des soixante-quinze ans, répondent à un questionnaire : comment vous sentez-vous dans votre âge ? Or, il s’agit -là d’un autre et vaste thème que nous n’aborderons pas dans cet article centré sur le Désert de l’amour de François Mauriac.

 Internet

 

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