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Grains de sel
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Blog créé par l'Association pour l'autobiographie (APA) pour accueillir les contributions au jour le jour de vos vécus, de vos expériences et de vos découvertes culturelles.
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14 juillet 2021

Une page de vacances

André Durussel

(Extrait de Vives clartés, journal autobiographique déposé à l’APA)

La maison de vacances que j’ai eu le privilège de découvrir à la suite de mon mariage en 1968 était située dans un écrin de pins roses et de chants d’oiseaux, sur la rive droite du lac de Neuchâtel, en Suisse, précisément à Yvonand. Elle appartenait à une tante de ma femme qui vivait là sa retraite, après une carrière de sœur diaconesse de la Communauté de Saint-Loup dans les divers établissements hospitaliers où elle avait été envoyée. Tout d’abord à Orbe, puis à Bienne (Wildermeth), et enfin à Yverdon-les-Bains.

C’était un chalet avec des volets rouges, caché au sud d’une petite forêt au début de l’Avenue des Pins, tandis que le lac était tout près. Il y avait là un grand jardin potager avec une terre sablonneuse, ainsi qu’un verger qui donnait presque chaque automne des pêches délicieuses. Sous les ombrages de ces arbres, alors que crépitait la chaleur du mois d’août, je lisais l’œuvre de François Mauriac découverte lors de mes années lucernoises, ainsi que celle de son fils Claude. Ce dernier, dans son journal à Malagar, notait ceci, à la veille de la Seconde Guerre mondiale et des entrevues Hitler-Chamberlain, le samedi 24 septembre :

Mobilisation générale en Tchécoslovaquie… Nouvelles contradictoires. Angoisse : mobilisation partielle en France.

Claude Mauriac : Histoire de ne pas oublier. Journal 1938, © Grasset & Fasquelle, Paris, 1992, p.220

 Ce 24 septembre était aussi celui du jour de ma naissance.

Ainsi, sous les pins, je découvrais Le romancier et ses personnages, un ouvrage autobiographique au même titre que Mémoires intérieurs, ou encore Le mystère Frontenac qui, selon Edmond Jaloux, est une forme de confession romancée. Je pénétrais, toujours avec François Mauriac, dans cette mystérieuse alchimie de toute création littéraire, celle où fiction et réalité seront toujours étroitement liées, cette « autofiction » selon la belle définition de Serge Doubrovsky. Je vivais par procuration comme un lointain héritier de ces landes brûlées par le soleil… Ah, ce cher Mauriac ! N’étais-je pas, toutes proportions gardées, en train de m’identifier à lui ? Comme Maurice Barrès avait reconnu la qualité de son premier recueil de poèmes en décembre 1909, intitulé : Mains jointes, j’avais moi-même été admis dans le microcénacle de l’Association cantonale vaudoise des écrivains par son affable et distingué président payernois Henri Perrochon (1899-1990). Ce dernier m’avait en effet accordé une préface élogieuse à mon premier recueil de poésie, intitulé Le Poids léger des jours, publié à compte d’auteur en 1967 chez Fabien Perret-Gentil, à Genève.

Vers le soir, ayant quitté le verger et la table de lecture, je faisais une promenade le long des rives de la Menthue. La lune se levait par-dessus les collines de Rovray, tandis que le vol de deux hérons cendrés, qui regagnaient leur nid, me rappelait à la réalité. Ce n’était certes pas les palombes chères à François Mauriac, mais la cadence de leur bruissement d’ailes m’ouvrait à l’immensité d’un même ciel. J’entrais en littérature comme un chérubin de sacristie, selon cette définition ironique de ce grand romancier.

Ce temps des vacances estivales à Yvonand s’est achevé une dizaine d’années plus tard, avec le décès de cette chère sœur. Or, il demeure toujours dans l’écrin de ma mémoire.

Internet

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