Chroniq’hebdo | De Camus, de l’actualité et de Quimper
Pierre Kobel
Je ne sais ce qu’il y a d’universel dans les paillettes de Cannes. Si j’aime le cinéma, les histoires qu’il me raconte, il est des films dont l’universalisme relève d’un factice sans autres enjeux que commerciaux. Et tout aussi factice, le professionnalisme qu’affichent les acteurs sur le tapis rouge du festival sous les projecteurs et les flashs impersonnels des photographes.
J’y pensais en lisant le numéro que le magazine Lire consacre à Albert Camus. Si lui aussi a acquis une aura devenue internationale, c’est parce que son œuvre et ce qu’elle transmet puise profondément à ses racines, parce qu’elle relève d’un véritable humanisme, loin de la philosophie raisonneuse et des idéologies carcérales. Camus ne délivre pas de message, il pose des questions et en cela, il nous aide à vivre. Et s’il a encore des détracteurs, il ne faut pas s’en désoler comme le dit sa fille Catherine Camus, c’est la preuve qu’il dérange encore.
Je crois que La peste est le premier livre de poche que j’ai acheté juste avant L’Atlantide de Pierre Benoît. Ce n’est pas mon livre préféré de Camus. Celui qui m’accompagne le plus est Noces. Et aujourd’hui encore, je suis surpris par l’étonnante modernité de l’homme qu’il était. Non seulement celle de son œuvre, mais également celle de la personne, de son allure, de sa voix. Il n’aura pas eu le temps de vieillir, nous ne le connaissons que jeune et il est dans mon panthéon à hauteur de Montaigne.
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J’évoquais plus haut les paillettes de Cannes. Ce mois de mai égrène les festivités printanières récurrentes puisque s’y ajoutent le tournoi de Roland Garros et ses bavardages médiatiques insipides et le temps d’un week-end le bruyant GP de F1 de Monaco. Autant de manifestations qui donnent cette année, un goût bizarre à l’actualité quand elles se confrontent à la guerre qui se prolonge en Ukraine, aux méfaits du dérèglement climatique et à un nouveau massacre aux États-Unis qui pleureront leurs morts avant de les oublier jusqu’à cette nouvelle tuerie. Oui bizarre contraste entre futilité mode « panem et circenses » et un tragique qui ne cesse de nous menacer jusque dans notre quotidien. Et je citerai Camus : « Je tiens au monde par tous mes gestes, aux hommes par toute ma pitié et ma reconnaissance. » Combien il faut savoir garder de l’espoir pour écrire cela en 1937 !
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De retour, hier soir, d’un long week-end à Quimper, je pensais à la réflexion de Bernard quant à ce qu’offre Paris par rapport à la vie provinciale. Certes la capitale incite à beaucoup voir, écouter, mais à me promener dans les petites rues de la capitale finistérienne, j’ai aussi apprécié cette récréation de l’esprit loin du stress parisien. J’ai vécu quatre jours avec un sentiment de paix et de protection qui n’existe pas ici.