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Grains de sel
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Blog créé par l'Association pour l'autobiographie (APA) pour accueillir les contributions au jour le jour de vos vécus, de vos expériences et de vos découvertes culturelles.
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3 mai 2023

Umavu twamaya ou désespoir en mahorais

 Nadine P.

 Il est difficile quand on a habité quelque part ou quand un pays nous a touchés fortement en y voyageant, de ressentir les mêmes sentiments que pour d’autres lieux lorsque des évènements s’y produisent. On n’est pas neutre ! Arrivent les souvenirs, les visages et le morceau de vie, parfois plusieurs, qui frappent en plein cœur.

 J’ai déjà fait un billet sur Hérat et l’Afghanistan il y a quelques mois pour tenter de calmer mes sentiments ou pour les partager, mon écriture va hélas à Mayotte cette fois, cette île qui m’est chère ô combien. Discrètement dans un premier temps, s’est montée une opération de police en dehors des lois, en dehors de l’humain à prendre en compte, avec un arrière-goût affreux d’amalgame entre illégalité/délinquance, saleté et étrangers. Sorte de ratonnade « légale », une honte.

20230503gds_vie_npic_Umavu_twamaya_case Je les connais ces bangas de tôles où s’entassent les familles, je les ai vues ces gamines de blanc immaculé vêtues sortant de ces lieux de misère, me demandant comment elles faisaient pour être si impeccables au milieu de la terre glaise qui envahit tout, travaillant leurs devoirs sous le seul lampadaire du quartier, l’électricité manquant dans de nombreux baraquements, tentant de se réinventer une vie normale. J’ai connu une amie bibliothécaire qui vivait là avec son compagnon anjouannais, des élèves de mon école, des conteuses mahoraises et amies, d’autres inconnus et croisés, des gens sans rien, des femmes/hommes et enfants sans identité, sans biens, sans rien que ces refuges minables, des gens quoi !

 Aux informations, une femme mahoraise et française, dit habiter dans son banga depuis… 27 ans. Elle n’est pas considérée comme délinquante notoire elle et ses petits, mais elle n’a pas accepté le repli ailleurs qu’on lui proposait (rien n’est dit sur celui-ci) alors, elle doit partir. D’autres ont des numéros écrits sur leur porte de tôle, celles qu’on épargnera.

 Oh ! Comme j’ai pensé aux années terribles où l’étoile peinte sur les portes marquait ceux qu’on voulait bannir. J’ai peur de ce monde, vraiment. Est-ce le mien ? Le nôtre ? Où va-t-il si on excuse toutes ces dérives extrêmes ?

 La mission est stoppée le matin même où elle devait débuter, dit-on. « Ce n’est pas légal de faire une opération collective punitive », résume le Président de la Ligue des Droits de l’Homme. S’il continue comme ça, il n’est pas près d’avoir sa subvention !

 Images où des sans-papiers sont au-dessus de la colline et les gendarmes leur tirent dessus avec des bombes lacrymogènes pour les déloger. C’est dit par un membre des forces de l’ordre, tout se banalise, les actions comme les mots. Je suis écœurée, totalement. La généralité de demain ne fera pas de différence entre les gens à emprisonner pour fautes graves et ceux qui ont fui la misère des Comores pour la plupart, entre les gens de peu et les accusés pourtant anonymes, entre les maisons branlantes donnant cependant un toit, et celles qu’on veut raser pour insalubrité des quartiers pauvres.

 Il n’y aura que des uniformes face à des pans de tôles sans forme et des gens apeurés, dont leurs frères comoriens, ne veulent plus et je pleure les gestes qui vont s’abattre sur leur vie de rien. Si ce département était dans le centre de la France métropolitaine rien de toute cette infamie ne pourrait avoir lieu, l’information aurait été relayée bien plus tôt, car c’est l’opération visible qui est arrêtée pour un temps, pas celle qui depuis des mois avance en rampant.

 Des gens se désolent qu’on n’aille pas jusqu’au bout, ils manifestent même pour qu’on jette dehors ces voyous, ces criminels voisins. Ils en ont marre et le disent haut et fort. Le ras-le-bol peut-il tout autoriser ? D’autres crient victoire que la loi est parlé.

 Mais où est la victoire puisque ce serait bien étonnant qu’ils en restent là et que les troupes rentrent chez elles, enfin, chez nous. Idem du côté des Comores, eux qui se battent contre le statut de Mayotte depuis la fin des années 70 non plus, ils tiennent enfin là les cartes et une belle revanche.

 La question naïve m’est venue quand j’ai songé à la somme astronomique qui a dû être engagée pour envoyer policiers et gendarmes sur l’île. Combien de maisons de planches, donc solides, aurions-nous pu construire avec le budget de cette mission ? Naïve je suis.

20230503gds_vie_npic_Umavu_twamaya_visage

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