Chroniq’hebdo | De la résistance, du mariage et des masques
Pierre Kobel
Durant la semaine, il y a ce billet de Nadine à propos de ce qui se passe à Mayotte, son indignation désabusée : « Naïve je suis ». Non, pas naïve ! Ce qu’elle exprime a valeur de résistance. Résistance à la bien-pensance, résistance à la civilisation hypocrite qui laisse à l’abandon les plus défavorisés avant de les chasser quand la situation dégénère. Masques de l’ordre et de la sécurité pour rassurer le plus grand nombre, éradication de la misère au prix de l’inhumanité. Opérations policières là-bas et ailleurs pour assurer l’avenir politique d’un ministre qui construit son image à coups de menton et d’agressions verbales. Non, pas naïve !
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Je reviens d’un mariage familial de très proches. Jeunes gens qui prennent le pari d’une existence commune. Cela me ramène très longtemps en arrière à mon propre mariage qui n’a duré que quelques années… Je me souviens de ce serveur du restaurant où avait lieu le repas de noces qui me dit qu’il espérait que les mariés étaient contents de la soirée. Il n’avait pas réalisé que j’étais le marié ! Anecdote qui me parle toujours et me laisse dubitatif quant à cet engagement pour lequel je mêle un peu d’admiration et pas mal d’incrédulité. Admiration pour le pari qu’il représente et ce à quoi il engage. Incrédulité au regard de ma propre expérience qui n’a aucune valeur d’exemple, mais qui me rappelle souvent à combien de compromis, de soumissions, il faut se plier pour vivre ensemble.
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Masques. Nous portons des masques. Je le sais en vivant, en écrivant. J’écris cela en pensant à ces civilisations premières qui utilisent des masques pour symboliser le passage d’un âge à l’autre, d’un statut à l’autre. Mais quels masques sont possibles quand « LA civilisation » que nous prétendons incarner se rend coupable de la destruction des autres au nom de valeurs qui, elles-mêmes, sont le masque de la cupidité et de la brutalité aveugle, du non-respect d’autrui ? J’y pensais en regardant une fois de plus qui s’ajoute à je ne sais combien d’autres, le film Danse avec les loups.