Des personnes et des insectes…

Catherine Bierling

 Après les rencontres de Lyon qui nous ont fait réfléchir sur le temps qui passe, le thème de la vieillesse semble aussi en préoccuper certains (dont moi). Il est bien réconfortant de ne pas se sentir trop seul devant ce phénomène inéluctable. Les journées de Lyon furent un moment de partage, d’amitié, de rencontres, de discussions et d’approfondissements. Irremplaçables journées ! (dont une ancienne participante disait qu’elles devraient être remboursées par la sécurité sociale !)

Après ces moments intenses, sans cesse entouré de personnes qui partagent nos intérêts, on se sent d’autant plus seul lorsqu’on se retrouve deux semaines dans un village silencieux des Cévennes pour des vacances au calme…

Alors, faute de discussions plurielles et enrichissantes, je me suis mise à observer plus intensément les insectes et les oiseaux.

Bien qu’on évoque leur dramatique disparition, on a l’impression que les insectes nous entourent et colonisent la maison dès qu’on en est absent. En premier lieu, les araignées aux longues pattes maigres — qui ne sont pas des insectes ! — tissent partout leurs toiles que l’on frôle dans chaque recoin. Mon vœu serait qu’elles nous débarrassent au moins des moustiques-tigres entrant par effraction dès qu’on oublie de baisser les moustiquaires ou de tirer le voilage de la grande baie vitrée. Mais apparemment elles ne les apprécient guère ou bien ils sont trop difficiles à capturer ?

Sur le balcon, des fourmis ont établi leur autoroute qui les mène vers le grenier. Nous répugnons à employer les grands moyens chimiques tant qu’elles se contentent du balcon et du grenier. Un arrosage copieux les détourne de leur chemin pour quelques heures, mais elles retrouvent toujours la voie qui les amène vers l’étage supérieur où elles ne semblent pas causer de dégâts.

Mieux vaut fourmis que termites !

Avant que nous ne remplacions les antiques portes et fenêtres par des exemplaires plus hermétiques, il fallait parfois partager l’espace avec quelques scorpions, surtout à l’automne, lorsque les nuits deviennent plus fraîches. Leur venin n’est pas mortel, dit-on, mais je préfère ne pas m’y confronter, donc je les préfère dehors où ils dorment en général tout le jour sous les pierres chaudes.

Au jardin, nous avons installé un hôtel pour abeilles solitaires, où elles viennent déposer leurs œufs avant de boucher l’entrée des petits trous percés dans le bois.

Souvent au printemps on voit aussi l’énorme abeille charpentière roder parmi les fleurs du cerisier. D’un beau noir bleuté, de taille imposante et produisant un fort vrombissement, elle peut faire peur, mais est totalement inoffensive et ne nous tourne jamais autour comme les guêpes énervantes du mois d’août.

Dans le feuillage des lilas, on découvre les cétoines d’un bleu ou d’un vert métallique du plus bel effet. Sur le trottoir se dandinent souvent les gendarmes noirs et rouges avec leur drôle de masque africain sur le dos.

Au crépuscule de juin, on peut même apercevoir parfois l’imposant scarabée rhinocéros en vol nuptial avec sa corne nasale recourbée vers l’arrière.

Depuis que je passe mes étés en Cévennes, j’ai appris à vivre avec tous ces êtres fantasmatiques, à partager leur espace sans en avoir trop peur. Alors que j’étais plutôt du genre à sauter au plafond dès que j’entendais un bourdonnement quelconque à portée de mon oreille. Je suis devenue d’autant plus attentive à eux, depuis que je les sais en danger de disparition. Les seuls que je n’accepte pas sont les envahisseurs, le plus souvent venus d’Asie avec les bateaux chargés de tous ces objets que nous ne fabriquons plus chez nous. Frelon asiatique, moustique-tigre, pyrale du buis, et d’autres s’ajoutant régulièrement à la liste. N’ayant pas ici d’ennemis naturels, ils sont capables de grandes destructions.

Pour terminer, je me réfère au livre de Jean-Henri Fabre, Souvenirs entomologiques, paru dans la collection Bouquins de Robert Laffont, à Paris en 1998 qui peut faire de son lecteur un véritable passionné des insectes. « Un hymne à la nature et à la connaissance » dit la préface.

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• Wikipédia | Jean-Henri Fabre