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Grains de sel
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Blog créé par l'Association pour l'autobiographie (APA) pour accueillir les contributions au jour le jour de vos vécus, de vos expériences et de vos découvertes culturelles.
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10 juin 2022

Paul Levasseur

C. P.

 Ce récit est un extrait d’un texte non publié non déposé à l’APA écrit par mon père Jean-Paul Levasseur.
Il parle de son propre père, Élève maître de l’École normale qui a 16 ans en 1914.

 logo_nos_ecolesÀ l’époque où ma mère faisait sa première communion, mon père entrait en qualité d’interne, au Cours complémentaire de Neufchâtel-en-Bray. Trois années de vie studieuse, éloigné des grands-parents nourriciers, avec de courtes visites à Fresles.

À la fin de la troisième année, en 1914, Paul passa le concours d’entrée à l’École normale d’instituteurs de Rouen et fut admis.

 Au début des vacances, qui s’annonçaient si bien, la guerre éclata, début août. Malheureusement, la rentrée ne se fit pas rue Saint Julien, dans cette école dont rêvaient tous les fils modestes de paysans. Elle était réquisitionnée et était devenue l’Hôpital 103, sous la direction de l’Union des femmes de France. Le Directeur, Monsieur Lestang et l’économe, y conservèrent leur bureau, mais tout le reste de l’immense bâtisse devenait le domaine de Madame Louvet de la Croix Rouge. Les normaliens furent logés chez les habitants du quartier. Paul échoua Pensionnat Tricot puis, début 1915, Pensionnat Trincal, ensuite à Petit-Quevilly.

 20220610gds-mem_cpret_paul_levasseur

Paul suit les cours de l’École normale quelque peu perturbés par la guerre. En juillet 1916, le Brevet Supérieur obtenu en une seule fois, Paul passe en révision avec sa classe, et la troisième année commence, avec la menace d’un départ aux Armées. En mars 1917, le certificat de fin d’études normales en poche, il termine ses humanités. Le 17 mars 1917, à dix-huit ans et demi, alors que la France est en guerre depuis deux ans et demi, et que ce conflit semble interminable, il est mobilisé. La moitié de sa promotion, 14 sur 30, devait disparaître dans la tourmente, sans compter ceux qui moururent des suites de la guerre, blessure ou gaz, dans les années qui suivirent. Paul part à Louviers faire ses classes. Et, après une permission agricole du 23 octobre au 21 novembre passée dans la ferme de Lépronde, après un stage jusqu’au 6 mars 1918, le front réclamant des renforts, Paul est affecté au 5e corps 9e division 4e Régiment d’Infanterie, 2e Compagnie matricule 103, et monte en première ligne. À la mi-avril, la 9e division arrive en Alsace reconquise. Le 1er juin, baptême du feu. La 2e Compagnie, entraînée par son chef, le Capitaine Bucard, exécute un coup de main et ramène des prisonniers. Elle est citée à l’ordre de la division. Son capitaine écrit, en marge de la citation :

 À mon cher Paul Levasseur
Le plus jeune caporal-fourrier
Du 4e Régiment d’infanterie
Avec mon souvenir le plus affectueux

M.Bucard

 Embarqué le 4 juillet, le régiment débarque le 5 dans la Somme. Puis, brusquement, les bataillons reprennent le train en direction de la Champagne. C’est la bataille de la Marne. Le 17 juillet, le 4e franchit la Marne sur les ponts minés prêts à sauter. Combats furieux. Le 27, l’ennemi cède enfin. Du 1er au 23 août, le régiment se réorganise. Le 2 août 1918, le soldat Levasseur Paul est cité à l’ordre de la 9e division.

« Levasseur Paul, élève maître de l’École normale, sergent-fourrier, matricule 103, au 4e Régiment d’Infanterie : Fusilier-mitrailleur, n’a pas hésité, malgré un violent tir de mitrailleuse, à mettre son arme en batterie, permettant ainsi à ses camarades de progresse »

 Le général Gamelin

 Paul est évacué, atteint d’une diarrhée aiguë, mauvais état général. Et il échappe à la terrible bataille du 4 au 7 septembre. La 2e Compagnie se distingue encore, enlève le village de Courlandon et poursuit l’ennemi après avoir franchi la Vesle. Une 3e croix de guerre est accrochée au fanion de la 2e Compagnie qui est citée à l’ordre de l’Armée.

 Bucard répond à une carte de Paul : « Mon bébé dévoué… Eh oui, la 2e division s’est encore distinguée. Je pourrais te retourner la phrase : Pends-toi, brave bébé, nous avons vaincu à Courlandon ! et tu n’y étais point… »

 Paul rejoint, selon son désir, la 2e Compagnie et retrouve son cher Capitaine. Les combats continuent. Le 2 octobre le canal de l’Aisne est franchi. Les pertes sont sévères. Soudain, le 11 octobre, l’artillerie se tait. Le Boche lâche le pied. La poursuite continue. 3e citation à l’ordre de l’Armée.

 Le 11 novembre 1918, l’armistice est signé. Paul est employé à la réfection des routes, aux travaux agricoles et est détaché au Prytanée militaire de La Flèche. Ce n’est que le 12 mai 1920 que Paul est renvoyé dans ses foyers et se rend chez ses parents à Mesnières en Bray. En octobre, il est nommé instituteur aux Grandes-Ventes où il passe son Certificat d’aptitude pédagogique. En octobre 1921, il est nommé à Maromme où il reste deux ans. C’est alors qu’il est invité au mariage de sa cousine et fait connaissance de Louise FRETEL, qu’on lui a donné comme cavalière.

 Le 8 août 1922, Paul Levasseur, instituteur, vingt-trois ans, prend pour épouse Louise Fretel sans profession, 19 ans, à Saint Vaast D’Equiqueville. La photo traditionnelle est prise, une centaine d’invités. À la fin des vacances scolaires, Paul emmène sa femme Louise habiter à Maromme, 1, rue des Belges. À la fin de l’année scolaire, Paul demande un poste en campagne, ressentant peut-être déjà les prémisses de sa maladie. Le premier octobre 1923, il est nommé à CROIXDALLE, canton de Londinières, à l’autre extrémité de cette forêt du HELLEY où se trouve la ferme de Lépronde.

 Mais je n’attendis pas Croixdalle pour naître. Le 31 mai 1923, un jeudi, je voyais le jour au domicile de Angèle Cossard, ma grand-mère maternelle, dans la vieille demeure où ma mère avait elle-même vu le jour, maison de commerce habitée par plusieurs générations de mes aïeux. Au premier étage, au-dessus de la « boutique », était la chambre natale. Mes parents habitaient à Maromme où mon père était instituteur. Ma mère avait quitté sans mélancolie sa maison. C’était encore une toute jeune fille, sortie depuis peu de l’étreinte des Sœurs de la Providence. Elle se sentait tout naturellement exilée et revint se mettre sous la protection de la mère nourricière et sécurisante.

 

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