Chroniq’hebdo | De l’imprimerie, de la complexité et du monde inquiétant.
Pierre Kobel
De passage à la FNAC, je tombe sur ce panneau de livres de et sur Sylvia Plath. Je n’y peux rien, elle me poursuit et quoique je pense de ses pathologies, je reste quelque peu fasciné par l’écrivaine qu’elle est. Occasion d’ajouter des titres à ma liste d’envies dans mon téléphone. Addiction aux livres. Je me console en pensant que cela vaut mieux que des travers plus préjudiciables à l’existence et à la santé que celle-là.
Cette addiction je la retrouve en visitant l’exposition Imprimer ! L’Europe de Gutenberg à la BNF François Mitterrand évoquée ici par Elizabeth, il y a peu. Dans une salle est dressée la reproduction d’une magnifique presse des débuts de l’imprimerie à laquelle s’affaire un artisan en démonstration. Nous échangeons et je repars avec une feuille dont l’encre n’est pas encore sèche. On ne mesure quelle révolution des esprits a provoqué cette invention que si on prend la mesure de celle que provoque aujourd’hui l’arrivée du numérique.
Le développement du livre imprimé c’est à la fois l’accès à beaucoup plus de connaissances et plus encore une telle augmentation de ces connaissances qu’il n’est plus possible de posséder un savoir universel. Que dire de l’information telle qu’elle se développe aujourd’hui, qui atteint un tel degré de multiplication que cela devient le moyen de manipuler l’opinion ? Avancée des techniques, connaissances et infos à tout va, mais toujours la démonstration qu’elles sont tenues par les puissants et les gouvernants. Ils laissent se développer la surinformation qui empêche d’y voir clair pour faire preuve de répression quand certains utilisent les mêmes outils à bon escient pour dénoncer leurs pratiques et leurs décisions.
J’ai aimé la chronique de Christophe Bourseiller, Ce monde me rend fou, samedi matin sur France-Inter, dans laquelle il parlait des notions de complexité et de systémique qui servent d’excuses pour ne pas prendre parti devant les problèmes du monde. Je suis le premier parfois à dire mon sentiment d’impuissance devant l’actualité de la société et de notre planète. Bourseiller oppose à cela la simplexité. Néologisme pour dire qu’il suffirait souvent de revenir à la simplicité des choses pour les comprendre et véritablement s’impliquer.
Mais que faire face à cette actualité qui de jour en jour rajoute des couches d’inquiétude au lit de notre impuissance ? C’est le climat qui nous dévore et plus encore dans des villes qui ont supprimé toute végétation, bitumé, bétonné à court rendement sans prendre le temps d’une perspective à long terme. C’est la Russie qui se fait de plus en plus inquiétante quand un coup de force raté — ou un coup de bluff ? — du mercenaire Prigojine et de ses miliciens sans âme du groupe Wagner déstabilise le pouvoir sans qu’on puisse mesurer les effets de ce qui se passe.
Le monde devient un cyclone incontrôlable face auquel il faut se battre ou se laisser mourir. Pour moi je retrouve là le poids des mots puisque je n’ai que cela pour dire, au risque de me perdre.
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